La dépression est un problème de santé publique qui prend de l’ampleur, mais dont de nouvelles solutions sont proposées régulièrement par des chercheurs. L'une d'elles, la thérapie génique ciblant le cerveau, semble efficace sur des souris dépressives.
A quand la thérapie pour l’homme ?
En ce jeudi 21 octobre, journée européenne de la dépression, une bonne nouvelle nous provient des laboratoires américains du New York-Presbyterian Hospital et du Weill Cornell Medical Center. Les chercheurs ont en effet publié les résultats très encourageants d’un traitement de la dépression par thérapie génique.
La majorité des traitements de la dépression cible les conséquences de la maladie, en omettant la cause originelle. Si ces traitements sont efficaces pour certains patients, pour ceux qui souffrent de dépression avancée cela n’est pas suffisant. La nouvelle étude effectuée sur des souris et publiée dans la prestigieuse revue Science Translational Medicine propose une alternative qui pourrait s’avérer efficace pour ces patients.
Tout commence en 2006, lorsque Paul Greengard, qui avait obtenu le prix Nobel en 2000 pour ses travaux sur la neurotransmission entre les neurones, a découvert le rôle de la protéine p11.
Celle-ci est nécessaire pour exposer à la surface des neurones les récepteurs de la sérotonine, un neurotransmetteur impliqué dans une multitude de fonctions, incluant l’appétit, l’humeur, le sommeil et souvent lié à la dépression. Des souris chez qui le gène p11 est absent déclarent d’ailleurs un état dépressif, la sérotonine ne pouvant plus jouer son rôle.
Cibler le cœur du cerveau
Les chercheurs ont alors eu l’idée de déterminer précisément le site d’action de la protéine p11 dans les symptômes dépressifs. En procédant à l’extinction spécifique du gène dans deux régions cérébrales par ARN interférence, ils ont constaté que seule l’extinction de l’expression de la protéine p11 spécifiquement dans le noyau accumbens entraîne un état dépressif de l’animal.
Celui-ci a pu être caractérisé par l’observation du comportement des souris : une diminution des efforts pour se débattre lorsqu’elles sont tenues par la queue, ou une diminution des performances de nage.
Structure cérébrale connue pour être impliquée dans les symptômes d’accoutumance et de dépendance, le noyau accumbens est aussi intimement associé au plaisir, au système de récompense ou au rire. Les chercheurs ont alors tenté l’expérience inverse : exprimer le gène p11 dans le noyau accumbens chez des souris dépressives privées du gène. Les rongeurs traités retrouvent un comportement normal et semblent donc guéris.
Un résultat similaire chez l'homme ?
Ces résultats pourraient s’avérer identiques chez l’homme. En effet, les chercheurs ont complété leurs recherches en autopsiant les cerveaux d’hommes souffrant de dépression et ont montré que la protéine p11 est significativement moins exprimée dans les noyaux accumbens des personnes dépressives.
Ces résultats sont donc intéressants et pourraient permettre de mener vers des essais cliniques de thérapie génique, comme ce fut le cas en 2007 sur des patients atteints de Parkinson.
Cependant, des questions restent sans réponse. Les causes de la dépression sont multiples et ce modèle murin qui correspond à un manque de sensation de plaisir n’en est qu’un exemple.
Il faudrait compléter les recherches en testant la thérapie sur plusieurs modèles de la dépression chez la souris (stressées, anxieuses). De plus, les effets de l’expression permanente de la protéine p11, même après la guérison n’ont pas été étudiés.