Une nouvelle étude publiée dans le journal scientifique SLEEP en décembre 2010 montre que le cœur et le cerveau seraient liés encore plus étroitement qu'on l'aurait imaginé : les effets dommageables d'un infarctus du myocarde ne se limiteraient pas seulement au cœur, mais toucheraient aussi le cerveau.
En effet, il provoquerait des pertes neuronales au niveau du tronc cérébral, engendrant des troubles d'insomnie, notamment en sommeil paradoxal. Or, le sommeil joue un rôle essentiel dans la rémission après l'infarctus. C'est ce qu'a démontré l'équipe de Roger Godbout, Ph. D., avec son collègue Guy Rousseau et leur étudiant Thierno Madjou Bah, chercheurs au Centre de recherche de l'Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal.
Bien que l'insomnie soit depuis longtemps observée à la suite d'un infarctus, aucune étude, jusqu'à présent, n'avait pu expliquer scientifiquement le phénomène, autrement que par le stress sans doute provoqué par la crise cardiaque. Grâce à la présente étude, nous avons pu démontrer qu'il existe bel et bien une explication physiologique, soit la mort de cellules jouant un rôle clé dans le sommeil, souligne le chercheur, également professeur titulaire au Département de psychiatrie de l'Université de Montréal.
Ainsi, dans les deux semaines qui suivent un infarctus du myocarde, en plus de démontrer que les périodes de sommeil paradoxal étaient moins fréquentes et de moins longue durée, on a observé que les neurones cholinergiques du tronc cérébral, neurones qui contrôlent le sommeil paradoxal, sont en moins grand nombre, ceci dû à un phénomène d'autodestruction des cellules qu'on appelle apoptose.
Traiter l'insomnie pour une meilleure guérison du cœur
Une étude antérieure, réalisée également par l'équipe de MM. Godbout et Rousseau, avait fait la démonstration que l'infarctus du myocarde affectait le système limbique, une zone du cerveau responsable de l'humeur, ce qui expliquait la dépression souvent observée après la crise. Comme la dépression est souvent accompagnée d'insomnie, nous avons voulu vérifier si les neurones du tronc cérébral étaient également affectés, explique le chercheur.
Tel que le démontre la présente étude, en plus de pouvoir causer la dépression, l'infarctus du myocarde est aussi associé à la libération de facteurs qui favorisent l'inflammation des tissus, y compris le cerveau, et en particulier des régions qui contrôlent le sommeil, notamment la phase du sommeil paradoxal. Cette phase a notamment comme fonction d'activer les régions du cerveau responsables d'intégrer nos émotions. Si elle est affectée, le risque de dépression s'en trouve aussi accru.
On sait qu'un pauvre sommeil est un facteur de risque pour les maladies cardiovasculaires. Comme il peut nuire à la rémission à la suite d'un infarctus, le risque de complications et de récidive s'accroît et un cercle vicieux peut s'installer.
Selon M. Godbout, cette étude illustre l'importance d'intervenir rapidement, dès les jours qui suivent l'infarctus, et avant même l'apparition des premiers signes d'insomnie, tout comme ceux de la dépression. Il souligne que tout traitement préventif, pharmacologique autant que comportemental, est certainement une voie à considérer.