Un vaccin contre le virus du Sida pourrait-il enfin naître ? Un facteur de défense découvert chez le singe, et dont l’Homme possède un homologue moins efficace, pourrait en effet être aidé dans sa tâche par un nouvel antiviral.
Encore une nouvelle piste pour le développement d’un vaccin contre le virus du Sida ? Après beaucoup d’attentes et autant d’échecs, la nouvelle cible est-elle la bonne ?
C’est en tout cas l’espoir suscité par les recherches de scientifiques suisses des universités de Genève et de Zurich, qui ont précisément identifié le rôle d’une protéine cellulaire, dont l’homologue est connu pour conférer une résistance au virus chez certains primates comme les macaques rhésus.
Il s’agit de la protéine TRIM5, pour tripartite motif-containing protein 5 (protéine contenant un motif en trois parties), appartenant donc à la famille de protéines TRIM qui possèdent toutes une succession de trois domaines protéiques particuliers (RING finger, zinc-finger et région coiled-coil).
Certaines protéines TRIM sont d’ailleurs connues pour leur action dans la restriction de l’infection cellulaire par les rétrovirus.
TRIM5 : une action digne de sa famille protéique
Elles reconnaissent de façon spécifique les virus pathogènes, ce qui les mène à modifier l’expression des gènes de défense pour renforcer les armes de protection de l’organisme. TRIM5 ne déroge pas à la règle.
Chez le singe, elle est en effet connue pour reconnaître spécifiquement la capside du virus du Sida dès son entrée dans la cellule, mais aussi pour entraîner une réaction antivirale dont l’intensité est corrélée au niveau d’attraction de la protéine pour le virus.
Selon l'un des auteurs, Jeremy Luban du Département de microbiologie et de médecine moléculaire de l’Université de Genève, TRIM5 et notamment son action dans l’immunité innée serait impliquée dans la limitation de la propagation du virus dans l’organisme.
Une action qui expliquerait pourquoi, même sans traitement antirétroviral, le VIH met généralement plusieurs années à entraîner les symptômes du syndrome de l'immunodéficience acquise.
D’après les nouveaux travaux des chercheurs publiés dans la revue Nature, TRIM5 reconnaîtrait le maillage dessiné par les protéines de capside du virus et s’y attacherait. Cette interaction provoquerait une stimulation de la protéine, qui induirait la production de chaînes de polyubiquitine dans la cellule.
Par un processus de signalisation en cascade faisant intervenir différents acteurs protéiques au sein de la cellule, la protéine NF-KB, un facteur de transcription star dans la réaction immunitaire innée (par opposition à l'immunité acquise), serait finalement activée.
Renforcer la liaison entre TRIM5 et le virus
L’ensemble de ces processus permettrait d’éviter l’approche du virus vers le noyau de la cellule infectée, empêchant ainsi l’intégration de son génome dans l’ADN cellulaire. Cette étape étant indispensable à la multiplication du virus, TRIM5 contribue donc à empêcher le virus de se dupliquer.
Malheureusement, ce processus n’est réellement efficace que chez les primates. Chez l’Homme, il semble que le blocage du virus par TRIM5 ne soit pas maintenu suffisamment longtemps.
« On peut présumer que, chez l’humain, TRIM5 bloque de façon trop faible l’avancée du virus vers le noyau de la cellule en raison du manque de force de sa liaison avec le cœur du VIH.
Une voie d’investigation privilégiée actuellement, pour la conception d’un vaccin, est donc la recherche des possibilités de renforcement de cette liaison » a déclaré Jeremy Luban dans le communiqué de l'Université de Genève.